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Banjo à cinq cordes

Novembre 2025

Fig.1

Derroll Adams / banjo Framus, “Fête des Leus”, Frasnes-lez-Couvin, Belgique, 1978

Derroll Adams / banjo Framus, “Fête des Leus”, Frasnes-lez-Couvin, Belgique, 1978. (Photo Michel Botte), coll. Gérard De Smaele

Fig.2

Banjo à cinq cordes, modèle « Derroll Adams », Framus, Pretzfeld, Allemagne, vers 1974

Banjo à cinq cordes, modèle « Derroll Adams », Framus, Pretzfeld, Allemagne, vers 1974, inv. 2019.0005

Fig.3

Derroll Adams, publicité Framus, recto, 1975

Derroll Adams, publicité Framus, recto, 1975. Coll. G. De Smaele, inv. 2018.299a - Cote 6 R 224a

Fig.4

Derroll Adams, publicité Framus, verso, 1975

Derroll Adams, publicité Framus, verso, 1975. Coll. G. De Smaele, inv. 2018.299a - Cote 6 R 224a

Fig.5

Banjo Framus à cinq cordes (détail du cheviller), vers 1974

Banjo Framus à cinq cordes (détail du cheviller), vers 1974, inv. 2019.0005

Banjo à cinq cordes modèle « Derroll Adams »

Ce banjo à cinq cordes fut offert au MIM en 2019. La production de cet instrument fut supervisée par Derroll Adams, à qui est consacrée l’exposition présentée ce mois dans le bâtiment Saintenoy.

Derroll Adams (fig.1), chanteur et banjoïste américain, est né en 1925 à Portland, Oregon. Il arriva en Angleterre en 1957, traversa ensuite la France et l’Italie en compagnie de Jack Elliott (°1931), qu’il était venu rejoindre à Londres, et se posa finalement en Belgique¹. C’est là qu’il s’établit et qu’il termina ses jours en février 2000. De Bruxelles, puis d’Anvers, son hub stratégique, l’artiste rayonnera à travers l’Europe. Armé d’un solide héritage musical, mis en valeur par un talent et un charisme exceptionnels, il marquera de son empreinte le folk revival des années soixante et soixante-dix, tant en Angleterre que sur le continent européen.

Pour nous, l’année 2025 sera celle du centenaire de la naissance de ce personnage devenu légendaire, né un an après Earl Scruggs (1924‑2012), six ans plus tard que Pete Seeger (1919‑2014), ses illustres banjoïstes contemporains², qui firent renaître après la guerre un instrument en voie de disparition.

La peau, d’origine animale ou synthétique, et la forme ronde de sa caisse caractérisent le banjo, tandis que le 4, le 5 et le 6 cordes restent encore trop souvent confondus du grand public (fig.2). Malgré leurs points communs, ces instruments appartiennent cependant à des univers musicaux différents. Avec sa courte chanterelle, fixée latéralement à même le manche, la configuration du banjo à cinq cordes nous ramène directement à ses origines africaines³. Bien que le timbre des banjos joués au plectre (comme le ténor et le plectrum durant les débuts du jazz) ait profondément marqué les esprits durant l’entre‑deux‑guerres mondiales, c’est cette version originale à cinq cordes qui historiquement représente sa forme la plus pérenne. Elle est aujourd’hui associée au riche répertoire de la musique traditionnelle américaine (dans la old‑time music et le bluegrass), tandis qu’au XIXᵉ siècle l’instrument s’était imposé au centre de la scène du minstrel show, pour évoluer par la suite vers le finger style, un style de jeu appelé de nos jours classic style⁴.

Bien que dès le XIXᵉ siècle le minstrel stroke style et le classic style aient aussi connu un formidable essor en Angleterre⁵, il faudra attendre le grand folk revival des années 1960 et 1970 pour que le banjo à cinq cordes réapparaisse de manière significative sur le continent européen. Au moment de l’arrivée de Derroll Adams en Belgique, celui-ci était encore un grand absent.

Des boutiques d’instruments de musique de Bruxelles, en plus d’un taux de change défavorable et de frais d’importation prohibitifs, compliquaient l’importation depuis les USA. Celui qui ne pouvait se rendre à Londres à la recherche d’un banjo ancien devait alors se contenter d’un Framus ou d’un Marma, des marques provenant d’Allemagne et d’Europe de l’Est, seuls fabricants des banjos présents sur notre marché. Figure devenue incontournable, Derroll Adams s’était bâti une solide réputation chez nous, essentiellement en Europe, dans les cercles de la folk music. C’est dans ce contexte que l’artiste fut approché en 1972 par Fred Wilfer, le directeur de la firme Framus, rendue notamment célèbre par la guitare acoustique Zenith 17 jouée par Paul McCartney, afin de diffuser en Europe un instrument à la fois abordable⁶ et de bonne qualité. Il sera proposé à la vente jusqu’à la fermeture de l’entreprise, victime de la concurrence japonaise, à la fin des années 1970 (fig.3 et 4).

Le présent exemplaire possède une couverture de cheviller ornée d’un motif à trois étoiles (fig.5). Il représente la première version du modèle. Derroll Adams y apportera par la suite divers ajustements⁷.

Texte : Gérard De Smaele

Notes de bas de page

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